Irkoutsk – Oulan-Oude : 6 jours le long du lac Baïkal

Journal de bord de Victor

Jour 1 : Irkoustk – sommet de col – 61 km
Nous passons la soirée à Irkoutsk au restaurant « Le Baïkal » avec Julien, aventurier auto-stoppeur, puis le début de la nuit à préparer le vélo. Nous ne profitons que 7 petites heures du lit confortable car nous avons décidé de repartir. Le réveil sonne : 9h heure locale – 4h heure de Moscou. C’est dur comme un TD à Centrale un lendemain de soirée. Un peu d’hésitation… se reposer un jour de plus ? Non le soleil et le lac nous attendent dehors… il faut y aller !!
La sortie de la ville est longue et pénible mais la circulation diminue doucement à mesure que nous en sortons par la P-258. Les voitures ont aléatoirement le volant à droite ou à gauche. Pas de doute, on est en route pour la Mongolie.
Martin (notre GPS) nous indique qu’il faut passer par 2 cols à 800 et 900 m. Pas d’autres solutions, le Baïkal se mérite !
Ce n’est pas l’Himalaya mais de tels reliefs sont nouveaux pour nous. Nous découvrons la différence entre les pentes à 6,7,8,9,10,11 ou 12%. Nous terminons chaque col sur le 1er plateau 1ère vitesse à 5 km/h… Ça nous réconforte un peu d’entendre les moteurs des camions et des vieilles Lada souffrir comme nos jambes dans les montées. Nous avons le plaisir d’être encouragés toute la journée : klaxons, pouces levés, hola, exclamations, coucous, appels de phares et warnings. Le compteur à pouces (oui il existe dans la tête de Mathilde) explose. C’est lorsque les montées sont les plus fortes que nous sommes les plus forts tous les deux. Pas question de poser le pieds à terre, pas question de flancher. Les descentes sont un régal. Pour la première fois nous utilisons les 3 freins pour ralentir le tandem qui file à 69km/h en bas de la descente. Nos yeux scannent la chaussée à grande vitesse pour voir venir le danger.
Nous montons les 2 cols la première journée et bivouaquons peu après car la nuit tombe plus vite et le froid s’annonce. Nous retrouvons avec plaisir les joies du camping, ces petits gestes et habitudes que nous avons pris depuis plus de 2 mois maintenant. Aujourd’hui est un peu un nouveau départ. Un nouveau départ dont nous nous sentons aujourd’hui capable après les expériences accumulées sur les routes rassurantes d’Europe. Nous sommes heureux de reprendre l’aventure sur le vélo après cet intermède citadin stressant de gares, noodles, scotch, papier journal et cellophane.
Bientôt le Baïkal !

J2 – 2nd col – Байкальск – 82 km
Nous dormons 12 heures. Les deux cols sont passés mais cela ne signifie pas la fin du dénivelé. Nous continuons à monter et descendre sans cesse. Nous nous appliquons à optimiser nos efforts : nous emmagasinons un maximum de vitesse dans chaque descente pour se lancer à fond sur le plat et dans la prochaine montée en appuyant fort sur les pédales.
En récompense de nos efforts, de magnifiques paysages de montagnes et de forêts s’offrent à nous. Au bout de 30 km c’est le sommet à 1000 m avant de plonger vers le Baïkal ! D’un coup il nous apparaît coincé entre 2 lignes électriques. Il est là, grand et calme sous nos yeux. Le lac est la plus grande réserve d’eau douce au monde, il est tellement grand qu’on pourrait y plonger la Nouvelle-Calédonie sans problème. La route devient plus tranquille mais n’oublie toujours pas de monter et de redescendre entre les montagnes russes. Nous nous arrêtons en haut des montées pour nous équiper de nos pulls car le fond de l’air s’est bien refroidi. Nous découvrons des petits villages le long de la route et rencontrons notre premier cyclo-voyageur ! Il est Chinois ! Photo obligatoire ! Il est ravi d’apprendre que nous allons faire du vélo en Chine.
Encore quelques montées. Le lac devient encore plus beau à cette heure de la journée. Nous bivouaquons à la tombée du jour sur une petite plage de pêcheurs qui nous donnent leur bénédiction pour y camper. Nous nous endormons heureux et satisfaits des kilomètres parcourus… près de 3000 m de dénivelés positifs en deux jours… l’équivalent de 23 Ouen Toro pour les Calédoniens ou de 10 tours Eiffel pour les moins Calédoniens.

Je remets le maillot à pois de l’étape à Mathilde qui s’avère un puissant moteur dans ces montées !

J3 – Байкальск – танхой – 89 km
Ça y est, nous avons repris un rythme plus proche de celui du soleil. Andrei, l’haleine chargée, nous bénit pour le reste de notre voyage sur le parking de la supérette ou nous nous ravitaillons en eau et en nourriture. Dans les supérettes, les denrées sont derrière un comptoir et parfois périmées, bref, on rigole bien quand on veut demander des œufs et qu’on ne s’exprime que par mimes !
Les rivières que nous croisons rythment notre progression. Nous déjeunons au bord de l’une d’elle à midi. Nous voyons de nombreux vendeurs au bord de la route qui vendent du poisson du lac (le Omoul), ou des baies, ou les deux. Le relief nous permet enfin d’atteindre une bonne vitesse moyenne. 17h30 : nous campons sur une belle plage au bord d’un petit village, moins beau lui. Au loin, on aperçoit des pêcheurs sur le lac.
Nous sommes le 1er septembre, c’est le jour de la rentrée des classes en Russie. Tout le monde s’est habillé sur son 31 pour l’occasion et pas de vente d’alcool ce jour-là ! On se rattrapera demain !
Après 2 jours de toilettes de chat, nous profitons du lac pour s’y baigner… elle est froide mais il paraît qu’un bain jusqu’à la tête prolongera notre vie de 25 ans… ça vaut le coup !

J4 – танхой – ьоярский – 82 km
La pluie nous attend au réveil ce matin… dur ! Le vent s’est levé lui aussi, il fait froid ! Nous inaugurons une nouvelle technique qui consiste à prendre le petit déjeuner directement dans la tente. Cela nous permet de profiter encore un peu de notre nid douillet avant de sortir affronter les éléments sur notre vélo.
Nous avions été plutôt chanceux jusqu’ici puisqu’un grand soleil nous avait tenu compagnie. Nos gants chauds jusqu’ici restés au fond de la remorque prennent du service ! On sort aussi nos nouveaux bonnets tout neufs achetés à Irkoutsk. Nous repartons sur la grosse route de Oulan-Oude. Je confie à Mathilde que j’aimerais être un sachet de nouilles chinoises au sec et au chaud au fond de la remorque. Elle aimerait être une paire de chaussette chaude car elles sont rangées au milieu des doudounes, toujours dans la remorque ! Toujours autant de camions qui nous doublent et dont je surveille la trajectoire d’évitement. Nous nous arrêtons dans un petit village pour le petit déjeuner. Un petit chien vient nous tenir compagnie. Il aura 3 morceaux de saucisson et 2 bouts de fromage, le veinard. Mon petit moteur électrique est fatigué, Mathilde a les cuisses qui la font souffrir… Les kilomètres de dénivelé ont laissé des traces… mais elle tient bon, encouragée par les ouvriers qui refont la route et nous filment et par un conducteur de train qui nous klaxonne. Les premiers rayons de soleil percent a travers les nuages. Nous en profitons pour faire sécher le toit de la tente pour dormir au sec ce soir. Nous plantons une dernière fois la tente au bord du lac Baïkal avant que la route ne bifurque vers les terre pour rejoindre Oulan-Oude. En haut d’une falaise, nous avons le spectacle d’un coucher de soleil magnifique. Bière et dernière baignade dans le lac ! On regrette juste que le train passe si près du bord car malheureusement nous en entendons beaucoup défiler, surtout des trains de marchandises qui transportent du bois, du charbon, de l’essence ou parfois des tanks. Nous nous arrêtons juste avant la borne des 300 km. Demain nous espérons bien atteindre la borne des 400 km !

J5 – ьоярский – на паром – 101 km
A nouveau un réveil sous la pluie… cette fois le moral n’y est plus trop. Je mets de la musique sur notre enceinte nomade pour nous motiver. Nouveau petit déjeuner sous la tente. Nous profitons d’une accalmie pour vite tout rentrer au sec dans la remorque et les sacoches étanches. A nouveau, le vent s’est levé et dans la bonne direction. Il nous aide sur le début du parcours qui est devenu plat. A la pause de midi, nous avons déjà parcouru 75 km ! À mesure que nous progressons dans les terres, les arbres sont de moins en moins verts. On voit apparaître du jaune, du orange, du rouge, ça y est l’automne est là. Il fait environ 13℃ et beaucoup moins en ressenti. Mathilde dont les jambes vont mieux après les massages de la veille, a du mal à se faire au froid, surtout ses orteils, qu’elle réchauffe énergétiquement à un arrêt de bus. Nous avalons rapidement les 25 derniers kilomètres et plantons la tente le long d’une rivière. Nous en profitons pour tester notre système de filtration d’eau, celui-ci fonctionne à merveille et on se servira de l’eau de la rivière filtrée pour faire cuire les tagliatelles ! Aujourd’hui étaient nos derniers kilomètres vers l’Est. Demain nous entamons la descente vers le Sud, vers le soleil ! Il est grandement temps !

J6 – на паром – Oulan-Oude – 58 km
Houra ! Pas de pluie ce matin ! Nous partons donc du bon pied attaquer nos premiers kilomètres vers le Sud. Nous croisons des petites marmottes au bord de la route. Mathilde est fan et veut s’arrêter tous les 50 mètres prendre une photo. Un col nous attend encore d’ici Oulan-Oude. Comme des oignons, nous retirons les couches au fur et à mesure que la machine chauffe dans la montée. Heureusement, le sommet arrive avant que l’on soit tout nus. Au sommet, nous rencontrons une Roumaine d’origine mongole qui n’en revient pas de notre aventure et nous offre des pâtisseries en forme de têtes de tigre qui sont plus mignonnes que bonnes. Nous nous arrêtons dans un café de routiers pour profiter du WIFI et se réserver un petit nid douillet à Oulan-Oude. Le vélo est garé devant le café. Les routiers qui le voient en rentrant n’en croient pas leur moustache. On est des stars. Nous entrons dans Oulan-Oude sous le soleil et profiterons à fond du confort de notre chambre pour se reposer et se laver ! Oulan-Oude, c’est le genre de ville où le touriste ne met pas les pieds mais plutôt le genre de ville où on vient s’enterrer le temps d’un audit environnemental chez l’industriel du coin. Malgré tout, la ville est plutôt jolie et sympathique à visiter. Nous allons au restaurant pour fêter mon anniversaire avec 1 jour d’avance car on ne sait pas de quoi demain sera fait… nous reprenons la route vers la Mongolie !

Retrouvez toutes les photos ici !

5 commentaires sur « Irkoutsk – Oulan-Oude : 6 jours le long du lac Baïkal »

  1. Coucou les enfants, c’est toujours un plaisir de vous lire et avec vos superbes photos ça nous donne l’impression d’y être. Bon courage pour la suite et bon anniversaire à Victor.
    Papa et Sylvie

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  2. Pour un premier récit il est top Victor! je reconnais bien ma soeur dans tes descriptions..
    En effet on dirait que vous avez pu saisir tout le sens de l’expression « montagnes russes » :).
    plein de bisous et de pouces pour votre baromètre 👍

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  3. Encore une fois beaucoup de courage à vous les amis bien que je sais que vous n’en manquez pas!! C’était trop bon de vous revoir, on remet ça à Oulan Bator!!
    Bon passage de frontière!!
    Votre ami de la route/ Julien

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